La Confédération et les cantons ne devraient pas non plus prévoir de distribuer le bénéfice de la BNS à l'avenir
Pour la première fois depuis 2014, la Confédération et les cantons ne recevront pas de distribution du bénéfice de la BNS cette année. La perte record d'environ 130 milliards de francs a non seulement entièrement consommé la réserve de distribution, mais l'a fait passer en territoire négatif. Les 6 milliards de francs, qui correspondent à environ 3 % des recettes annuelles totales, manqueront donc aux budgets financiers.
L'inversion de la politique monétaire en 2022 et la fragilité de l'environnement d'investissement auront également un impact sur les finances publiques. L'ampleur de la perte subie par la BNS l'année dernière peut probablement être considérée comme exceptionnelle : une grande partie peut être attribuée à la constellation inhabituelle de fortes baisses simultanées des prix des actions et des obligations. Cependant, l'époque où la distribution du bénéfice de la BNS pouvait être considérée comme plus ou moins acquise est révolue – a-t-elle jamais existé ?
Mais que peut-on attendre de l'avenir ? L'année 2022 devrait rester une année d’exception, mais au cours de l'année dernière, la BNS est passée du mode déflationniste au mode inflationniste. Les facteurs centraux de la politique monétaire qui ont favorisé les bénéfices élevés de la BNS se sont donc inversés.
La phase de taux d'intérêt négatifs est terminée. En même temps, cela signifie que la BNS paie à nouveau aux banques commerciales des intérêts sur leurs dépôts, au lieu de recevoir un bénéfice en retour. Un franc suisse plus fort s'inscrit également dans le concept de lutte contre l'inflation. Les pertes de change sur les investissements étrangers sont donc plus probables que les gains de change.
Toutefois, le bilan de la BNS devrait rester déterminant dans un avenir prévisible : à la fin de 2022, les positions en devises étrangères s'élevaient à quelque 800 milliards de francs, soit environ 104 % du PIB suisse. Bien que la réduction du bilan soit désormais en cours, la performance des placements et l'évolution des prix sur les marchés financiers mondiaux influenceront encore longtemps les résultats de la BNS. Et là, les signes sont redevenus plus favorables depuis le début de l'année 2023. Selon un calcul rétrospectif, la BNS aurait pu récupérer environ 17 milliards de francs rien qu'en janvier 2023 avec l'évolution de la bourse et des taux de change depuis le début de l'année. La perte au bilan de la BNS, après la perte record de 2022, est d'environ 39 milliards de francs. Sur ce montant, environ 4 milliards de francs sont imputables au franc suisse, qui ne s'est affaibli que d'un demi-point de pourcentage, démontrant une fois de plus son grand effet de levier. En outre, les taux d'intérêt à long terme des obligations d'État importantes, qui ont eu tendance à baisser à nouveau depuis le début de l'année, ont probablement entraîné de nouveaux gains d'évaluation de ce poste très important du bilan, de l'ordre de 65%.
Que signifie tout cela pour la politique financière de la Confédération et des cantons ? De nouvelles distributions de la BNS, y compris pour 2023, ne sont pas exclues. En principe, la BNS a encore un potentiel de profit, mais de grandes fluctuations sont non seulement possibles, mais probables. Toutefois, avant de pouvoir procéder à de nouvelles distributions plus importantes, la réserve de distribution doit être reconstituée. La Confédération et les cantons ont donc raison d'accepter les distributions de la BNS comme un revenu supplémentaire bienvenu, mais de ne pas les inclure dans leur planification financière.
Cette évolution montre une fois de plus à quel point les bénéfices de la BNS sont insuffisants pour garantir le financement d'initiatives importantes comme l'AVS ou la promotion de l'innovation. Dans le passé, ces demandes étaient rejetées à juste titre et il était fait référence aux ressources budgétaires ordinaires pour un éventuel financement.